Pologne
Un voyage en Pologne : présentation de Cracovie et les camps d'extermination d'Auschwitz et de Birkenau.
- Parenté :
- Europe
- Pologne
Cracovie [carte]
La Pologne fut fondée en 1034 par Casimir Ier. À l'inverse de la République Tchèque, l'essentiel de l'économie polonaise est basée sur l'agriculture. Les aides de l'Union Européenne aident ce pays à sortir de la pauvreté et à se moderniser. La première impression lorsque l'on traverse les villes de ce pays est en effet un état de délabrement impressionnant, comme si la guerre s'était achevée un mois auparavant et une reconstruction effrénée qui pourrait faire croire que l'argent ne circule que depuis une semaine : ruines désaffectées et maisons en construction de côtoient. Le sentiment dominant est que tout reste à faire, à commencer par s'attaquer au sérieux problème de la pollution visuelle que constituent les dizaines de kilomètres carrés d'herbe couverte de sacs plastiques.
L'économie est en pleine restructuration : du temps de l'URSS, la monnaie polonaise était inconvertible : elle ne servait que pour les échanges intérieurs et les prix étaient indépendants des coûts de production. L'économie est donc actuellement planifiée : un étalonnage se met en place progressivement. On peut donc espérer qu'à terme, cette économie saura répondre aux problèmes de la faible valeur de la monnaie (4 Zlotys pour 1 €) et surtout aux 17 % de chômage. (chiffres d'avril 2005).
Le lieu central de Cracovie est la place de la halle, une des plus grandes places d'Europe. La halle servait autrefois de marché aux draps. On peut également voir sur cette place la basilique Sainte-Marie, reconnaissable à ses murs en briques et son monument en hommage à Jean-Paul II.
La ville accueillera les Journées mondiales de la jeunesse en 2016.
Auschwitz et Birkenau [carte]
Auschwitz
Ce camp de 6ha était d'abord destiné aux prisonniers politiques polonais, puis aux Juifs et Tziganes de plusieurs nationalités (yougoslave, polonaise...) et également aux captifs soviétiques. Ce lieu, choisi car il possédait déjà des bâtiments, en brique, était situé à l'extérieur de la ville, ce qui a permis de l'agrandir par le camp de Birkenau. De plus, cette zone était bien desservie par les trains. On a rajouté aux bâtiments initiaux les tours de surveillance ainsi que la clôture électrifiée de 220 V.
Au dessus du portail d'entrée du camp se trouve une inscription cynique : « Travailler rend libre », alors que le travail forcé jusqu'à l'épuisement était un des moyens de l'extermination. De même, un orchestre avait été créé, qui jouait une marche militaire lorsque les prisonniers partaient travailler.
Birkenau
Birkenau était le plus grand des camps avec ses 175ha. Il a contenu jusqu'à 100 000 personnes en même temps et était destiné uniquement à l'extermination. Un million de personnes y furent exterminés sur les 11 millions prévus. Ils venaient de tous les pays d'Europe, même les plus éloignés : France (69 000 Juifs français furent déportés dans ce camps, dont certains ont survécu), Norvège, Grèce, Russie, Pays Bas, parcourant jusqu'à 2400 km dans des wagons à bestiaux fermés de l'extérieur contenant parfois chacun 100 personnes.
On peut aujourd'hui visiter 67 « baraques » (sur les 100 ayant existé : certaines ont été détruites car aucune ne possédait de fondations, étant au départ prévues pour 52 chevaux) où les prisonniers dormaient dans des lits en bois à trois niveaux, dont le nombre était prévu pour 400 détenus alors qu'ils étaient jusqu'à 1000 ! Les baraques étaient réparties en secteurs : les Juifs et les Tziganes étaient séparés, les hommes et les femmes également. Leur construction a été interrompue par la fin de la guerre. Les quatre chambres à gaz de ce camp, détruites par les Allemands lors de leur départ, avaient été bâties par des prisonniers pour des prisonniers.
Les latrines n'avaient pas d'eau et l'hygiène était bien sûr déplorable en raison des diarrhées provoquées par la sous-nutrition : la ration quotidienne était minimale : café, soupe sans viande, 300 g de pain noir et 25 g de fromage pour les travailleurs, soit 1300 à 1500 calories quand 2200 étaient nécessaires pour le travail à accomplir. Cependant, vers la fin de la guerre, les envois de nourriture étaient tolérés, aux non-juifs uniquement : les familles et la croix-rouge pouvaient faire transmettre des colis. Mais les détenus subissaient toujours la boue, les inondations à cause des fuites ainsi que les vols et bagarres : la fraternité était rare sinon inexistante.
Le Kapo était le responsable de chaque baraque. Il pouvait arriver qu'il favorise les évasions mais le « chacun-pour-soi » était le cas le plus fréquent.
L'extermination
Appelée par les nazis « solution finale de la question juive », elle avait pour but la mort des Juifs de toute l'Europe, sans aucune exception. Ses méthodes étaient le travail forcé, les expériences pseudo-médicales criminelles puis les chambres à gaz, après 1942. Les corps étaient ensuite incinérés puis mis en terre.
Les hommes étaient séparés à l'arrivée des femmes et des enfants, le plus souvent directement exterminés. Les hommes passaient ensuite devant un médecin SS qui décidait sur l'aspect extérieur de leur capacité au travail. Les hommes inaptes au travail, dont on estime le taux à 75 %, allaient directement aux chambres à gaz, passant par un vestiaire souterrain, les nazis leur faisant croire qu'ils allaient simplement prendre une douche. En effet, les chambres à gaz imitaient l'aspect d'une immense salle de bain. Des colonnes étaient aménagées, par lesquelles était jeté le gaz Cyclone B, sous forme de granulés qui se vaporisaient à l'air libre, tuant en 15 à 20 minutes les 2000 personnes qui s'y trouvaient. Des prisonniers juifs, remplacés tous les quelques mois étaient ensuite chargés de transporter les corps vers les fours crématoires (qui ont succédé aux bûchers en plein air) après leur avoir enlevé cheveux et dents en or.
Les fours crématoires étant placés juste à côté des chambres à gaz, un moteur de camion était mis en marche pour que les prisonniers y travaillant ne puissent pas entendre les gémissements des agonisants. Les corps incinérés étaient ensuite mis en terre.
Le déshumanisation
Celle-ci commençait par remplacer le nom de chaque prisonnier par un numéro. Ils n'étaient ainsi considéré que comme une force de travail et donc humiliés. Chaque prisonnier était, par ce numéro, lié à une fiche qui contenait des informations médicales. Une autre de ses formes était le mensonge continuel : les nazis allaient jusqu'à fabriquer de faux billets de train pour tromper les prisonniers sur leur sort. Ils étaient également privés de leurs biens personnels : leurs vêtements étaient remplacés par un uniforme rayé et leurs bagages conservés dans les « canadas », leurs nom et date de naissance étant inscrites sur les valises. Cette déshumanisation de l'esprit était complétée par celle du corps, leurs cheveux servant à fabriquer des toiles en crin.
Si l'on soupçonnait qu'une évasion s'était produite, tout le camps était appelé : l'appel pouvait durer des heures pendant lesquelles tous restaient debout, dehors, dans le froid. La dignité de certains prisonniers était également mise à mal par les autres : ceux qui refusaient de continuer à se battre pour vivre, qui abandonnaient, étaient déconsidérés et méprisés par les autres détenus. Le refus des questions était aussi un moyen d'humiliation : « ici, il n'y a pas de pourquoi ».
La propagande
Les nazis recourraient à la propagande pour atténuer les soupçons : ils diffusaient de fausses images de ces camps pour faire croire que les conditions de vie y étaient décentes. De nombreuses photographies ont donc été prises à l'époque par le « SS de camp ». Le but était de faire croire qu'il ne s'agissait que de camps de travail. Ils produisaient en effet de l'essence et du caoutchouc synthétiques. Plusieurs milliers de fusillades ont eu lieu dans ces camps. Là encore, ils étaient tus aux autres prisonniers, les volets étant fermés et les armes équipées de silencieux. Pour détruire les preuves de la réalité, les Allemands ont incendié les bâtiments en évacuant les lieux en 1945. Les poëles présents dans les baraques servaient également à ce but : ils n'avaient pas de combustible.
Le block 11
Aussi appelé « block de la mort », il contenait un tribunal qui appliquait le principe de la « responsabilité collective » : en cas d'évasion, d'autres prisonniers étaient tués par la faim. Il comprenait aussi des cellules spéciales :
- la cellule 18 est celle où est mort Saint Maximilien Kolbe, qui avait demandé de prendre la place d'un des condamnés car celui-ci avait de la famille
- dans la cellule 20, les prisonniers, jusqu'à 40, mourraient d'asphyxie
- les cellules « reste debout » ne mesuraient qu'un mètre carré. Les prisonniers y étaient enfermés par quatre et ne pouvaient donc pas changer de position pendant plusieurs nuits
La Pologne
Ce pays a profondément subi la seconde guerre mondiale : Hitler avait pour but de le faire disparaître. L'armée soviétique y a perpétré des massacres d'intellectuels (prêtres, savants, professeurs).
Le 16 avril 1947, le premier commandant SS responsable du camps d'Auschwitz est pendu à l'intérieur même du camp. Il prétendait n'être responsable de rien, n'ayant fait qu'obéir aux ordres. Ce sentiment de déresponsabilisation pour cause d'autorité a été montré par l'expérience de Milgram. La famille de ce SS vivait dans le camp, dans une maison située un peu à l'écart où il aimait jardiner. La famille expulsée de la maison lors de la construction du camps y est revenue et y vit.
L'expérience de Milgram
En 1963, l'universitaire américain Stanley Milgram a procédé à l'expérience suivante : des cobayes (personnes lambda) étaient payées pour réaliser ce qu'elles croyaient être une étude du rôle de la douleur dans l'apprentissage : elles posaient des questions à un autre cobaye (ignorant qu'il s'agissait en fait un comédien) en lui administrant un choc électrique pour chaque réponse erronée, en augmentant progressivement la tension, jusqu'à atteindre des valeurs dangereuses (240 V pour 100 % des cobayes) voire mortelles (380 V pour 75 % des cobayes) et même maximales (450 V pour 64 % des cobayes).
Ces personnes, conscientes d'en faire souffrir une autre et de la mettre en danger, étaient nombreuses à se rebeller et à refuser d'appuyer sur l'interrupteur, mais face aux injonctions de Milgram, la grande majorité continuait à infliger cette douleur comme le demandait le scientifique, qui disait assumer entièrement la responsabilité du cobaye et cela au nom de la Science.
L'expérience a été déclinée en plusieurs versions et les seuls éléments capables de faire diminuer le taux de cobayes obéissant aveuglément étaient la responsabilité de leurs actes, la vue directe du comédien, l'absence du scientifique ou encore la présence d'un autre cobaye refusant d'obéir.
Milgram a donc conclu que la crainte du scientifique importait plus pour le cobaye que la conscience de la souffrance de l'autre. L'Homme préférerait donc obéir à des ordres absurdes plutôt que de s'y opposer s'il s'est engagé (ici en étant payé) à les effectuer.
On peut tirer de cette visite que l'aspect scientifique d'un processus n'implique et ne garantit certainement pas sa moralité : ce qui met le plus mal à l'aise, c'est que cette horreur a été prévue, pensée, calculée puis exécutée dans la plus absurde rationalité : on ressent en effet la froide rigueur et l'ordre qui ont permis à ce génocide d'avoir une si grande ampleur. Un grand danger serait de dire que l'horreur passée est intraduisible et inénarrable : elle est au contraire visible et dicible. Nous ne devons pas nous la cacher ni nous « voiler la face » : le passé peut se reproduire et l'étudier est une manière de s'en protéger. De plus, le « devoir de mémoire » est certes important, mais la mémoire est liée aux sentiments éprouvés face à l'Histoire. Une analyse rationnelle de cette même Histoire est elle-aussi nécessaire et même indispensable, c'est pourquoi il faut essayer de COMPRENDRE, SAVOIR et PARLER.
Ce génocide a été la mise en œuvre rationnelle d'un processus industriel dont seul le but était irrationnel. C'est donc la rationalité qui doit nous aider à nous approprier ce traumatisme qui appartient à l'Histoire RECENTE de notre Humanité.
Enfin, l'Espoir : même s'il est parfois plus que difficile à garder, il est souvent le seul moyen de supporter certains évènements voire de refuser de s'y soumettre et pourquoi pas lutter. Il doit donc être conservé précieusement, maintenu en vie et surtout transmis.
Les survivants
La torture des survivants n'était pas finie à leur libération. Ainsi, un nombre important d'entre eux évoquent dans leurs récits la « culpabilité d'avoir survécu » (Magda Hollander-Lafon). De même, il est couramment admis (mais pas prouvé) que Primo Lévi, autre survivant et auteur de Si c'est un homme s'est suicidé.
Cette page en français a été créée par Peter à partir de notes de voyage, 8 mai 2005 et modifiée pour la dernière fois 25 août 2020. Son avancement est noté 3/3.