Mine de Lewarde
Une visite du Centre historique minier de Lewarde, au pays des terrils et des berlines de charbon.
- Parenté :
- Europe
- France
- Nord-Pas-de-Calais
- Mine de Lewarde
La mine de Lewarde, dans le département du Nord, est une ancienne mine à charbon reconvertie en musée : elle est maintenant ouverte au public.
Références historiques
Le bassin minier du Nord
L'exploitation du charbon dans le Nord de la France a débuté au milieu du XIXe siècle. Cette activité a rapidement pris de l'importance dans l'économie locale et a marqué durablement la vie régionale, du mode de vie des ouvriers aux paysages du Nord en passant par le vocabulaire français. Le Nord-Pas-de-Calais comporte depuis 14 000 km de galeries souterraines.
L'événement le plus marquant dans l'histoire de l'industrie minière de la région fut le « coup de poussières » du matin du 10 mars 1906. Une explosion due aux poussières en suspension dans l'air a provoqué un couloir de feu : une boule de feu à 2500°C a traversé 110 km de galeries à près de 1000 km/h tuant 1099 mineurs. Cette catastrophe minière, la plus grande dans l'histoire de l'Europe, fut fortement médiatisée, et les journalistes qui ont afflué dans la région sans connaître le vocabulaire local ont créé de nouvelles expressions pour décrire ce qu'ils voyaient.
Ainsi, le nom local pour un « terril » est « terris », mais on aurait dit aux journalistes que le mot s'écrivait comme « fusil ». De même, lors de la catastrophe de 1906, la survie de 14 mineurs pendant 20 jours au fond de la mine (les sauvetages étant organisés par des mineurs volontaires mais sans formation spécifique) a donné naissance au mot « rescapé », qui vient de « s'échapper ».
Aujourd'hui, toutes les mines ont cessé leur activité, mais les terrils sont toujours visibles et témoignent de l'importance de l'activité minière dans la région.
Les terrils
Description
Lors de l'extraction du charbon, une quantité importante de gravats est dégagée : en moyenne une tonne par tonne de charbon. Depuis le XVIIIe siècle, ce sous-produit sans intérêt était simplement stocké en d'immenses tas appelés « terrils ». Leur forme correspond à un cône d'environ 400 mètres de diamètre pour 140 de haut. Ces collines artificielles, composées principalement de schistes, marquent donc fortement le paysage, puisque celui-ci était quasiment plat à l'origine.
En raison de la couleur très sombre de l'ensemble, le sol de certains terrils peut atteindre des températures assez élevées pour déclencher une combustion interne des résidus de charbon. Les roches deviennent alors rouges.
L'un d'eux, à Nœux-les-Mines, fut tranformé en piste de ski et inauguré le 25 mai 1996.
Faune et flore des terrils
Faune et flore ont progressivement colonisé les terrils et on peut ainsi y apercevoir des chevreuils, renards, lapins et divers oiseaux.
On observe également que des plantes de petite taille, parfois étrangères à la région, commencent par s'implanter. Certaines se développent même dans les zones en combustion. Elles fixent les pentes des terrils et apportent de la matière organique. Par la suite, d'autres espèces plus grandes peuvent alors pousser, comme le Bouleau. Le processus de colonisation des terrils par les plantes prend des dizaines d'années. L'ensemble forme finalement de véritables écosystèmes, différents de ceux présents avant l'intervention de l'homme, ce qui accroît la biodiversité.
L'histoire du lieu
Le musée de Lewarde est situé à l'emplacement de l'ancienne fosse de Deloi (« fosse » étant un terme local pour désigner un puits de mine et « Deloi » étant le nom de la personne qui a présidé la compagnie pendant plus de vingt ans). Ses bâtiments constitue le « carreau de fosse » (ensemble des éléments de surface d'une mine ; d'où l'expression « rester sur le carreau » lorsqu'un mineur arrive en retard) au milieu duquel se trouve le « chevalet » (tour métallique à la verticale du puits, servant à arrimer l'ascenseur), marqué du nom de « Deloi ».
Cette mine faisait travailler 1000 personnes, dont 800 mineurs de fond, durant ses 40 années d'activité (1931-1971). Jusqu'à 1000 tonnes de charbon pouvaient en être extraites quotidiennement. Il s'agissait donc d'une petite mine puisque certaines faisaient travailler 3500 personnes et extrayaient 8 millions de tonnes de charbon par an, contre 8 millions de tonnes en 40 ans pour celle-ci.
Le musée a ouvert en 1984. C'est ce lieu qui a été choisi pour son implantation, en raison de sa position géographique, au centre du bassin minier du Nord-Pas-de-Calais et parce que les bâtiments étaient encore récents et en bon état.
La visite
La salle des pendus
Les mineurs l'appelaient « vestiaire ». L'appellation « salle des pendus » date de 1906.
Cette salle était à la fois le vestiaire et la salle de bain des ouvriers (les femmes n'avaient pas de vestiaire dédié et devaient donc rentrer chez elles pour pouvoir se laver ; les jeunes garçons (surnommés « galibots ») avaient une petite pièce séparée). Les bleu-de-travail des ouvriers (appelés en patois local « loques eud fosse ») étaient pendus à des « monte-habits » numérotés. Chaque mineur disposait d'un jeton correspondant. Ce stockage au plafond avait de nombreux avantages :
- gain de place (1 vestiaire tous les 10cm au niveau du point d'ancrage)
- sêchage plus rapide (nécessaire car les vêtements étaient trempés par la sueur, la température sous le sol s'élevant d'un degré Celsius tous les 33m, et par l'eau qui était pulvérisée pour fixer les poussières) aidé par des pulseurs d'air chaud
- nettoyage de la pièce plus facile puisqu'il n'y avait pas d'obstacles au sol (la pièce était lavée trois fois par jour au jet d'eau)
Les douches visibles sont d'époque, à l'exception du fait qu'il n'y avait pas de carrelage au sol : celui-ci était en terre battue.
La lampisterie
La lampisterie est conservée dans son état d'origine et contient une collection de lampes. L'espace est cloisonné et le mineur, pour prendre sa lampe, passait nécessairement par une jeune fille (la lampiste), à qui il remettait un jeton qu'elle affichait sur un tableau. L'intérêt de ce système était de savoir, à tout instant, qui était au fond de la mine, le jeton identifiant le mineur par son numéro. Ce système est toujours utilisé partout dans le monde.
La collection de lampe présente l'évolution de cet outil entre le XVIIIe siècle et le XXe siècle :
- La lampe était à l'origine constituée d'une simple bougie fixée à un bâton.
- La lampe à huile est ensuite devenue la référence. Sa flamme était d'abord nue, c'est-à-dire en contact direct avec l'atmosphère. Cette lampe présente des risques très importants d'explosion en cas de présence de grisou.
- Elle a donc été remplacée par une lampe équipée d'un grillage (un tamis) mais qui éclairait donc moins.
- Le grillage fut ensuite remplacé par un verre qui avait comme inconvénients de noircir et d'être fragile.
- La lampe à cristal a été utilisée jusqu'en 1985. Son cristal ne noircit pas et est suffisamment épais pour ne pas casser. Elle permet de plus de détecter le grisou car sa flamme vire au bleu en présence de méthane.
- Son évolution permet de quantifier le grisou grâce à la hauteur de la flamme. L'ordre d'évacuation est donné dès que sa présence dans l'air dépasse les 2%.
- La lampe électrique, enfin, éclaire bien le champ de vision mais ne détecte pas le grisou. Elle tue aussi le travail des lampistes car les mineurs les chargent eux-mêmes.
Le métier des lampistes, quoique moins dangereux que celui des mineurs, n'était pas sans risque, car ceux-ci manipulaient de l'huile, de l'essence et finalement de l'acide (pour les batteries des lampes électrique).
La mine
La visite de la mine commence sur un petit train qui servait à l'origine à emmener les mineurs jusqu'au puit de mine.
La descente s'effectue ensuite grâce à un ascenseur descendant à 9m/s. Les berlines avaient leur propre ascenseur, à 14m/s. Ces ascenseurs étaient munis d'un « parachute », c'est-à-dire de crochets qui immobilisaient la cage en cas de rupture du câble. Cependant, lorsque le puits de mine était en cours de forage, donc avant l'installation d'un ascenseur, la descente se faisait dans un panier. Le puits de mine servait également à la ventilation des couloirs : un système de portes et de sas dirigeait un flux d'air à 4 m/s et permettait d'éliminer le grisou et de modérer la température. En effet, celle-ci était comprise entre 25 et 30°C, même pendant l'hiver.
La visite s'effectue ensuite dans les couloirs de la mine, où l'on retrouve les machines et techniques utilisées autrefois par les mineurs, expliquées à l'aide d'animations et de statues.
Les mineurs creusaient les parois, par paliers, en suivant la veine de charbon qui démarrait à -90m et plongeait à plus de 1000 m de profondeur. Le creusement était d'abord effectué à l'explosif puis à l'aide d'outils (à main puis marteau-piqueurs) par les « abatteurs ». Ceux-ci travaillaient couchés, espacés d'environ 5 mètres les uns des autres, dans des galeries inclinées de 30° et portaient des blancs de travail pour être plus facilement repérés. Ils étaient chargés de « boiser », c'est-à-dire d'étayer la galerie, puis de faire tomber la matière dans des wagonnets. Les mineurs étaient à l'origine payés en fonction de la masse de charbon qu'ils dégageaient. Ils négligeaient donc le boisage pour augmenter leur efficacité, ce qui a donné lieu à des effondrements. Le système de paiement fut donc modifié pour tenir également compte du boisage et améliorer ainsi la sécurité.
Une fois les berlines remplies de « tout-venant », le personnel de surface séparait les roches du charbon. Les employés de surface étaient principalement des femmes (85 %). Les enfants pouvaient travailler au fond dès 8 ans avant 1913. La loi de 1946 a augmenté l'âge minimum à 14 ans et imposé une formation de 14 à 18 ans (une semaine de formation pour deux semaines de travail au fond). La fin de la carrière arrivait à 65 ans. Quant aux syndicats, ils ont été créés en 1890. Leurs membres étaient des mineurs qualifiés élus pour trois ans, qui faisaient leurs rapports aux ingénieurs.
Les mineurs respiraient difficilement en raison des masques qu'ils portaient. Ils chiquaient pour recracher une partie des poussières qu'ils inhalaient.
Les chevaux ont été utilisés dans les mines dès 1848. Il s'agissait de races bretonne et belge plutôt petites (1,40m au garrot) et de mâles castrés, plus dociles. La descente était une opération difficile qui prenait au moins deux heures et une fois le cheval descendu, celui-ci ne remontait plus jamais. Il restait ainsi une douzaine d'années au fond à tirer des trains de 12 berlines, soit 7 tonnes. Le vétérinaire et le maréchal ferrand descendaient s'occuper d'eux dans leurs écuries souterraines.
Dans les années 1950, un système à base d'eau pressurisée a vu le jour. Il attaquait les parois grâce aux 80 kg de pression qu'il développait, afin de creuser des pré-trous où l'on introduisait des explosifs. Au cours des mêmes années sont apparus la lampe frontale et l'étançonnage métallique, ainsi que l'électricité, qui arrivait sous une tension de 5000 V, rabaissée à 500 V par des transformateurs sités au fond pour alimenter les outils. Des locomotives électriques on alors remplacé les chevaux. Elles tiraient des trains composés de berlines de trois tonnes chacune.
C'est enfin le téléphone qui est apparu : tous les mineurs pouvaient alors entendre les messages de la surface.
On peut encore observer :
- différents types de soutènements, depuis ceux en bois des années 1890 jusqu'aux vérins hydrauliques allemands modernes qui développaient une poussée de 180 tonnes. Les premiers étaient en bois de sapin et leurs craquements permettaient d'évaluer la solidité de l'installation. Avant les années 1960 voire 1970, les mineurs n'avaient pas de protections auditives Ils pouvaient alors entendre ces craquements ainsi que les avertissements de leurs collègues.
- un marteau-perforateur qui servait à creuser les galeries mais produisait une puissance sonore de 150 dB.
- une sondeuse des années 1950, qui servait à prévoir les veines de charbon ainsi que les poches d'eau et de grisou.
- différents dispositifs de sécurité destinés à stopper les couloirs de feu :
- des planches de bois soutenant de la poussière de craie sensées être renversées par la boule de feu et éteindre celle-ci en la mettant en contact avec la craie. Ce dispositif s'est révélé inefficace.
- des bacs suspendus, contenant chacun 80 L d'eau colorée (pour contrôler leur niveau) se renversant au passage du feu. Ce dispositif à fonctionné en Lorraine lors d'un accident qui n'a tué « que » 22 mineurs sur les 900 présents au fond.
Le musée
La fin de la visite se fait dans d'anciens bâtiments miniers. On peut y voir des machines et objets utilisés à l'époque ainsi que des reconstitutions de pièces, comme le bureau de l'ingénieur. Une exposition explique le processus de formation du charbon et présente les différents types de charbon existants (flambants, houille grasse, houille maigre, anthracite).
Matériel ferroviaire
Dans la cour intérieure et derrière le bâtiment principal se trouve du matériel ferroviaire de différentes époques.
Machines diverses
À l'intérieur du bâtiment principal se trouvent diverses machines à vapeur et turbines.
Cette page en français a été créée par Peter à partir de notes de voyage, 5 août 2005 et modifiée pour la dernière fois 25 août 2020. Son avancement est noté 3/3.